Nouvel-an, et la dame du kiosque et l’envie de mâcher
J’ai acheté du gui.
C’est un joli prétexte, tout vert, pour approcher d’un peu plus près ces toutes sortes de gens qui gravitent autour de nos solitudes. La dame du kiosque, le facteur moustachu, la voisine qu’a plein de chats et le Libanais du Kebab, après tout, c’est des gens qu’on aime bien, et à qui on a pas si souvent l’occasion de faire un bec.
Et puis quoi c’est vrai, une fois l’an, on peut bien étreindre moins ciblé, ouvrir les bras plus grand, plus loin, et jouer deux minutes à « tout le monde s‘aime ». D’accord c’est niais, mais il est peut-être caché là-dedans, le seul véritable défi qu’il nous reste encore. Sans blague, tomber la distance et sourire un peu comme un dadais, faut être cap’ de ça aussi, parce que tenir au milieu d’un monde qui s’écroule, c’est plus vraiment une gageure, depuis le temps qu’on en crève pas.
En plus, autour de nouvel-an, il y a comme un horizon qui se dessine, avec tout ce barda qui mélange espoir, volonté et euphorie. Et t’as vu, plus on élargit l’accolade plus on s’encourage les uns les autres, et on devient tout d’un coup vachement forts en résolutions. Ben oui, parce qu’alors si truc-muche le fait, on peut le faire aussi ! C’est décidé : on va manger moins de friture, lire Proust, entretenir les rosiers, soigner les préliminaires, fumer light, rembourser le frangin, reprendre le jogging, cotiser au WWF, visiter grand-maman, voter, faire quelque chose le dimanche, céder le passage, dire je t’aime, éteindre la télé, sourire à la caissière, rabaisser la lunette, aimer mieux…
Promijurécraché.
Alors bien sûr, c’est peut-être un peu naïf tout ça (surtout pour les préliminaires), mais
n’empêche que c’est agréable de se gaver pareillement de perspectives, à cause de l’envie que ça donne de mâcher 2005.
Achetez du gui, pardi.